2014 déc. 29
Tourisme administratif
16:21 - Par Gauhar - Saison 10 - Lien permanent
La chasse au visa est ouverte ! Cette région du monde s'organise autour du
contrôle des mouvements de tous. Une nouvelle collègue française, arrivée il y
a quinze jours pour prendre le relais d'un programme avec un visa de tourisme
d'un mois, doit repartir vers une escale internationale - Dubaï dans son cas -
munie d'une pile adéquate de document administratifs à présenter à l'ambassade
afghane locale pour obtenir un visa de travail en un temps non spécifié, de
l'ordre de plusieurs jours. Un jeune collègue afghan, appelé par la maison mère
helvète à participer en janvier prochain à Genève à un séminaire interne en
compagnie de trois autres afghans, passe le plus clair de son temps à courir
les bureaux, y compris ceux de l'ambassade suisse à Islamabad, seule habilitée
à délivrer des visas pour les ressortissants afghans, et par contrecoup ceux de
l'ambassade pakistanaise à Kaboul. Quant à moi, qui dispose pourtant d'un
passeport déjà estampillé à de nombreuses reprises, j'ai obtenu cette fois-ci
un visa de trois mois rapporté à deux en raison du décalage de mon arrivée, ce
qui m'impose des formalités identiques ici, et notamment d'aller montrer ma
bobine à un fonctionnaire soupçonneux dans les bureaux concernés du ministère
de l'Intérieur, récemment relocalisés dans le sud de la ville et encombrés
d'une incroyable cohue d'Afghans de tout poil venus se procurer un passeport
pour se rendre au Pakistan, alors qu'il n'y en avait pas besoin jusqu'au récent
attentat dans une école de Peshawar.
Voyons le bon côté des choses : pour la première fois depuis fort
longtemps j'ai pu passer de l'autre côté de la ville, et notamment aller
constater que le palais de Darulaman est toujours sous forme de ruine de
guerre, comme un pense-bête nécessaire et suffisant. Juste à côté est
entreprise depuis plusieurs années la construction d'un bâtiment destiné à
abriter la représentation nationale. On attend toujours.
Dans les quartiers sud comme ailleurs, la circulation est dispersée parce que
l'activité est ralentie, et même les bus de fonctionnaires se font rares ou
vides - sans doute pour éviter d'attirer les attentats.
Ce qui n'empêche pas la ville d'être attifée des attributs de la croissance
préconisée par l'économie capitaliste. Les grands ensembles immobiliers, trop
chers pour les bourses afghanes, sont donc vides, eux aussi...
...et les panneaux publicitaires géants font l'article selon les méthodes du
consumérisme triomphant.