Saison 8

Consultante pour Terre des Hommes, automne et hiver 2013-2014.

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2014 janv. 26

Sultan, Soleiman et Sofia

Voutes de Sultanahmet, la mosquée bleue
Comment mieux sceller une saison qu'en la sanctifiant en hauts lieux ? Mon escale stamboulie a été l'occasion de visiter toutes ces merveilles léguées à l'Islam par les empires successifs, les sublimes mosaïques d'Hagia Sofya, les chats gardiens du tombeau de Soleiman ou les voutes vertigineuses de la mosquée bleue.

Chat de garde au tombeau de Soleiman

Mosaïque sacrée à Sainte Sophie

Et quand on s'en est rassasié, il reste juste à monter en haut du phare de Galata pour embrasser d'un seul coup d'oeil l'Europe et l'Asie sur les rives du Bosphore.
Au-delà du Bosphore, depuis Galata

2014 janv. 13

Jour férié

Cailles en étal mobile à Kaboul
Pour répondre à la journée de Noël que j'avais passée à Djallalabad à enquêter au milieu des jeunes délinquants confinés dans le centre de rééducation, aujourd'hui est le jour de naissance du prophète Mohammad, et à ce titre férié dans tous les pays musulmans. Les colporteurs en ont profité pour proposer des denrées rares pour repas festifs, comme ici ces lots de cailles qui feront le délice des amateurs de gibier.

Je suis au repos forcé, mais ce n'est pas le cas de tout le monde puisque j'entends, juste au-dessus de ma tête, des coups de massue portés dans le béton de mon immeuble. J'espère bien qu'il s'agit des travaux qui permettront finalement au plafond et aux murs de ma salle de bain de rester secs. Je ne résiste pas à vous montrer leur état aujourd'hui, juste deux mois après remise à neuf ;)

Clocage après deux mois

2014 janv. 1

Meilleurs voeux pour 2014

Seasons Greetings
C'était au détour d'une route en Takhar, un paysage impossible juste derrière le pare-brise, que j'ai réussi à fixer par miracle. Totalement irréel, totalement vrai. Une métaphore parfaite.

2013 déc. 30

Moins une !

Première neige
Hier soir à la fenêtre de ma chambre, j'entendais un crépitement comme si un feu de bois était allumé à proximité. Rien pourtant sur la terrasse du bâtiment voisin, et nulle lumière flageolante pour signaler un quelconque foyer dans la rue en contrebas... Il faisait froid et nuit noire, je me suis endormie à peine rassurée : un petit malin aurait-il outrepassé l'interdiction des poêles à bois dans notre immeuble ?

L'explication m'est apparue ce matin, en contemplant la fraîche couche de neige sur le paysage : il s'agissait de grésil sur ma vitre ! Et c'est là que je me suis dit qu'il s'en était fallu de peu que je reste coincée à Djallalabad, car notre petit coucou n'aurait pas pu traverser le front s'il avait eu quelques heures d'avance :) ...et cela aurait pu durer plusieurs jours !

L'alternative aurait été un réveillon dans un hôtel vaguement menaçant au climat presque doux de Djallalabad plutôt qu'un réveillon dans mon appartement familier de Kaboul. Vu que l'électricité vient de sauter, je risque d'ailleurs d'y geler avant la nouvelle année ;) Et horreur, alors que je me suis transportée vers mon cyber-café favori afin d'y trouver à la fois chaleur et connexion, la coupure les a touchés aussi. Heureusement, ils ont un poêle à bois, eux !

Du coup, je me suis réfugiée au bureau d'une ONG amie, d'où je poste ce message :) Bonne année 2014 !

2013 déc. 29

De Tora Bora à Mahi Par

Beechcraft 1900D de l'UNHAS
Un bi-moteur Beechcraft 1900D qui se profile sur une base militaire au pied du refuge favori des talibans ? C'est le vol des Nations Unies qui va me ramener de Djallalabad à Kaboul, confortablement calée dans l'un des huit fauteuils en cuir qui semblent plus dessinés pour alléger les soucis d'un PDG que pour des humanitaires. Pour arriver jusqu'à l'avion, il aura fallu faire un jymkana au milieu de divers véhicules de guerre, sous l'oeil soupçonneux - et lourdement armé - des commandos chargés de la sécurité des drones dont c'est le terrain d'attache. Avant de décoller, il aura fallu attendre qu'ils aient dégagé la piste.

En dépit de cette clôture plutôt sinistre, ma semaine en pays pachtoune était parfaite : un climat doux pour oublier que l'hiver arrive ; des collègues aux petits soins qui lui ont donné un air de Noël ; et des histoires poignantes pour la matière du rapport à produire d'ici quelques semaines. On passera sur l'attitude tristement snobinarde et incompétente de la directrice des Affaires féminines. On oubliera qu'en raison des consignes de sécurité mon séjour en dehors des heures professionnelles s'est cantonné à l'hôtel. On s'émerveillera de la simplicité efficace de ceux qui trouvent toujours des solutions et de la chaude amitié qui se développe dès que l'on témoigne de l'intérêt et du respect à son interlocuteur.

Et avant de s'envoler au-dessus de Mahi Par - le point de séparation des montagnes entre les plateaux de Kaboul et de Djallalabad - on gardera un souvenir des enluminures que les camionneurs appliquent à leurs engins pour glorifier leur clan ou terrifier leurs concurrents ;)
Enluminures automotives

2013 déc. 28

Djirga ?

Un groupe d'homme barbus assis par terre autour d'une pièce, engoncés dans leurs patous, est-ce une djirga ? Vu le sérieux de leurs discussions, on pourrait le penser. Mais la présence d'une femme qui leur pose des questions annule cette idée... A-t-on jamais vu une étrangère animer une assemblée traditionnelle ?

Au cours d'une matinée intense ont été évoqués des sujets ardus concernant la résolution de conflits où sont impliqués des mineurs. Les anciens de communautés reculées comme les professionnels de la protection de l'enfance étaient d'accord : un jeune que la justice gouvernementale envoie en centre de rééducation juvénile est souvent condamné à la mort sociale, parce qu'il y fréquente d'autres qui pourraient le dévoyer, parce qu'il perd le contact avec son milieu naturel, parce qu'il ne peut plus aller à l'école, et enfin parce que la honte de sa condition rejaillit sur toute sa famille. Tous ont affirmé que les coutumes de réparation et de réconciliation pratiquées depuis des millénaires par les communautés pachtounes assuraient aux enfants les meilleures chances d'indulgence, de pardon, et de ré-éducation dans le cadre ferme et aimant de leurs familles.

Et puis, en fin de session, alors que s'exhalaient déjà les arômes du repas en préparation, la discussion devint épineuse. Il s'agissait de comprendre quelle serait leur réaction si jamais une de leurs filles, arrivée à la puberté, s'avisait de refuser le mariage que son père prévoyait pour elle et de s'enfuir avec l'élu de son cœur... ! Ces hommes farouches s'émeuvent alors d'un réflexe de colère meurtrière quasi unanime contre celle qui ignore l'ampleur des efforts faits pour son bien-être. Ils doutent de pouvoir pardonner à l'ingrate... Mais ils évoquent avec clarté la procédure traditionnelle qui pourrait désamorcer leur courroux dans l'honneur des familles et la paix de la communauté... Ouf !

Le déjeuner vient à point clôturer les débats. L'étrangère restera dans son coin pour les laisser profiter de cet instant de détente ;)

2013 déc. 27

Repos hebdomadaire & cuisine locale

Menu afghan
Un ragoût de poulet aux aubergines et purée de pois cassés accompagné de riz qabouli et de salade mixte, c'est beaucoup mieux que ce qu'avait laissé espérer la réception hier soir. Comme toujours en Afghanistan, c'est délicieux - si l'on sait faire abstraction de la propreté douteuse de la vaisselle ou du service approximatif de l'endroit pourtant réputé être le meilleur accueil local.

Dès le réveil j'avais craint le pire : ma clé 4G déclarait forfait, un gentil message d'Etisalat m'informait que son abonnement expirait ce jour, sans espoir de renouvellement puisque tout est fermé aujourd'hui. Dès que l'heure m'en a semblé acceptable, j'ai téléphoné à un des mes collègues afghans du bureau local. Et l'hospitalité traditionnelle s'est mise en branle : il s'est présenté à mon hôtel quelques instants plus tard, muni d'une clé d'un autre opérateur - Afghan Telecom - qu'il a aussitôt installée sur mon ordi.

Et là j'ai compris pourquoi la population afghane ne voit toujours pas venir les retombées du boom des télécoms : si Etisalat est une compagnie émiratie, la maison mère d'Afghan Telecom est... chinoise ! Les deux langues proposée dans l'utilitaire d'installation de cette nouvelle clé étaient l'Anglais et le Chinois simplifié...

Le choc des saveurs, vous dis-je !

2013 déc. 26

Fillette, fillette !

Regard intérieur
Elle ne s'imagine rien, cette gamine qui observe tranquillement autour d'elle alors que sa mère participe à un groupe de discussion à la direction provinciale des Affaires féminines. Elle ne sait pas qu'elle n'aura sans doute pas le choix de son mari, parce qu'elle aura appris à considérer comme bonne toute décision prise pour elle par sa famille.

Comme la plupart des personnes que l'on rencontre en Afghanistan, son regard vous transperce comme si le monde entier vous considérait à travers lui, sans fioriture ni concession. Un regard qu'on ne peut ignorer. Un regard qui provoque l'introspection. Un regard qui retourne et élargit l'horizon.

2013 déc. 24

Les mollas prennent soin de ma moralité ;)

Big brother afghan
Comme chacun sait, c'est Noël. Enfin, en Afghanistan on ne le sait pas toujours. D'ailleurs, cette semaine est la plus occupée de ma saison, puisqu'entre deux dimanche je vais rencontrer au bas mot cinquante personnes pour nourrir mon enquête sur la protection des mineurs dans la justice locale.

Et voilà qu'au hasard d'un surf sur mon site favori de voile virtuelle me saute aux yeux la preuve que les mollas locaux me considèrent, ainsi que tout autre internaute, comme un mineur requérant d'urgence leur protection. J'aurais tenté d'accéder à un site illégal. J'aurais outrepassé les lois de la république islamique d'Afghanistan. Il est donc urgent de me prodiguer un avertissement parce que mon comportement mettrait en danger la société, et de m'interdire l'accès à la page requise. Renseignement pris auprès de mes petits camarades pousseurs de pixels, la page concernée par l'interdiction traite de limite des cartes au-delà de 88° - à cause de la rotondité de la terre - et du risque de voir nos bateaux se perdre dans les glaces virtuelles... Des glaçons à 88°, c'est une alerte majeure pour un moteur informatique programmé par des fondamentalistes islamistes, cela suggère trop directement la proximité d'une boisson alcoolisée !

S'il n'était aussi triste par la logique qui l'anime, l'incident aurait pu réjouir les longues heures que je passe seule - au régime sec - tous les soirs de cette semaine dans un hôtel miteux... Il ne fait que me rappeler à ma banale condition humaine face aux tentations du conformisme bien-pensant.

Joyeux Noël, Etisalat !
Aux bons soins d'Etisalat

2013 déc. 23

Education en Nangarhar

Carte murale du Nangarhar
Le département de l'éducation de Djallalabad témoigne de l'importance de la ville : rendez-vous doit être pris à l'avance, et l'entretien sera écourté parce que notre interlocuteur a d'autres obligations. Avant de nous quitter, il aura néanmoins tenu à nous orienter vers les joyaux de son domaine, les lycées - l'un de filles, l'autre de garçons - qui jouxtent son administration.

La principale qui organise les destinées de plus de 5000 gamines de 7 à 18 ans était particulièrement attentive à présenter une image lissée de son établissement. La moindre mauvaise publicité, le moindre incident sur le chemin de l'école, en effet, provoquerait des levées de bouclier auprès des familles désireuses de préserver l'honneur de leurs filles.

Classe de mathématiques
Dans la classe de mathématiques du onzième et avant-dernier niveau, les élèves suivent avec dévotion le cours sur les limites. 'Il est comme notre père', disent-elles à propos du vénérable professeur. A côté, une salle d'informatique flambant neuf. Sur les murs séchent des enluminures de toutes sortes qu'un calligraphe est justement en train de poser, en arabe, en persan, en pachto, en anglais... il y a même une table de Mendeleiev !

Pourtant, comme à Rostaq une grande partie des filles n'a pas de salle de classe, et ici même pas de tente pour les protéger du soleil ou de la pluie : elles sont assises en tailleur dans la cour, et leur professeur écrit sa leçon sur un chevalet. A l'inverse, le principal du lycée de garçons mitoyen indiquera fièrement que ses 8000 élèves sont abrités dans des bâtiments adéquats. Malgré les annonces, depuis douze ans l'aide internationale n'a donc pas trouvé moyen de faciliter l'accès équitable à l'éducation pour les filles !

Peut-on en blamer la nonchalance des boutiquiers ?
En attente du chaland

2013 déc. 22

Spin Ghar

Au pied du pont de Behsud à Djallalabad
Pas l'ombre d'une montagne blanche à Djallalabad. Les sommets enneigés qui ont donné leur nom au plus fameux hôtel de la ville sont distants d'une centaine de kilomètres, et ne sont pour les citadins qu'une rumeur assourdie par la douceur locale.

Ici, l'amoureux berce l'objet de ses sentiments au fil de l'eau dans un esquif de conte de fées. Ici le jardinier époussette à la feuille de palmier les pots de cactées que le climat laisse croître en plein air. Ici il fait bon séjourner pour fuir la rigueur et la pollution kaboulies.
Jardins de l'hôtel Spin Ghar à Djallalabad
C'est donc ici que je passerai les fêtes, puisque c'est à Djallalabad que m'ont menée mes activités de la semaine. Doux et heureux Noël à tous !

2013 déc. 20

L'hiver arrive !

Pigeon blotti au soleil
Il gèle maintenant la nuit, même si les journées sont encore très belles, avec une quinzaine de degrés quand on est au soleil à l'abri du vent. La neige est annoncée pour mardi. Espérons juste que la faiblesse du réseau électrique arrivera à compenser la période difficile qui s'annonce. Ce n'est pas gagné, aujourd'hui je vous écris d'un restaurant pourvu d'une bonne connexion internet, où je me suis réfugiée parce qu'il n'y a plus chez moi depuis trente heures ni chauffage, ni eau chaude, ni cuisine, ni internet donc... Heureusement, mon lit est couvert de productions locales qui en conservent le confort - j'avais hérité il y a trois ans, à Nijrab, d'un jeté de lit en... léopard des neiges (j'ose à peine l'écrire)!

Si tout va bien, quand la neige arrivera la semaine prochaine, je serai à Djallalabad où je dois me rendre dimanche pour quelques jours. Le climat y est plus clément, parce que l'altitude beaucoup moins élevée et les vents du nord bloqués par les montagnes du Nouristan. Quand je rentrerai, ce sera pour voir sous mes fenêtres le ballet hivernal des pelleteurs de neige. Il y en aura moins parce que certains bâtiments traditionnels sont devenus - nous l'avions suivi de près - de magnifiques constructions dernier cri ;)

Nouvel immeuble en face

2013 déc. 12

Dialogue Nord-Sud

Ciel de Kaboul en hiver

Par une parfaite journée de début d'hiver kabouli, le ciel est d'un bleu profond, les vols de tourterelles circulent au gré des mouvements de leurs dresseurs, et l'on se plaît à contempler la rose encore en bouton au creux d'un jardin bien abrité du vent, où l'on vient de déjeuner sur une table au soleil. Alors qu'il se met en mesure de fixer l'instant, le quidam au repos perçoit un bourdonnement qui croît rapidement dans son dos jusqu'à incruster dans le cliché un attribut de l'appareil guerrier international implanté localement : un hélicoptère appartenant à l'une des ces patrouilles qui traversent deux par deux l'espace aérien afghan, de jour comme de nuit, au ras des terres ou des habitations.

Il y en a chaque jour des dizaines. La plupart s'en accommoderont en échange de l'idée que ce quadrillage est la garantie de leur sécurité. D'autres, de plus en plus nombreux au fur et à mesure que des pertes civiles 'collatérales' auront été provoquées dans leur entourage par des frappes aériennes aveugles, mal dirigées ou mal informées, manifesteront une animosité croissante contre 'l'occupation étrangère'. Ceux-là rejoindront tôt ou tard les talibans parce que les drones américains continuent de survoler leurs maisons, parce qu'ils auront eu le sentiment que les erreurs sont ignorées et incontrôlées, parce qu'ils craignent pour la vie de leurs familles. Vous imaginez-vous dans le fin fond de la Corrèze, habitant tranquillement votre ferme isolée sous l’œil d'un gros coléoptère intouchable qui menace de déclencher l'enfer s'il remarque quelque chose d'étrange... comme par exemple que vous soyez sorti cueillir des pissenlits pour votre salade du dîner, ce qui aura été interprété comme une tentative de dissimuler dans la terre des objets interdits, que vous aurait amenés le curé du village justement en visite ?!!!

Ce type de nouvelles est fréquent. Et l'on comprend l'argument de Karzaï qui ne souhaite pas donner un blanc-seing aux militaires américains sans un minimum de dispositions qui limiteraient le ressentiment des population rurales - celles qui sont prises en sandwich entre les internationaux et les talibans. Karzaï veut éviter que la fracture dont est victime l'Afghanistan, celle qui délimite les grandes zones géo-stratégiques de la planète, se fasse au détriment de l'identité afghane, qui a su jusqu'ici ménager la complémentarité entre les villages agricoles et les villes commerçantes.

La rencontre à Johannesburg des dirigeants internationaux autour de la dépouille de Nelson Mandela aura donné lieu à de grands moments de lyrisme Nord-Sud - comme la poignée de main entre Raul Castro et Barack Obama - probablement favorisés par le début de l'été austral. La rencontre éclair entre Obama et Karzaï n'a pourtant provoqué aucune étincelle d'optimisme : les négociations pour le traité de sécurité américano-afghan sont toujours dans l'impasse.

2013 déc. 9

Agent orange

Combinaison orange à Kaboul
Qu'est-ce que cet homme orange traversant au petit matin le cimetière sur la colline en face de chez moi, avec cette attitude renfrognée mais d'un pas décidé ? Serait-ce un évadé d'une des prisons secrètes encore saupoudrées par les Etats-Unis dans le monde entier, et sur le territoire afghan ? C'est aux détenus de Guantanamo que m'a fait penser ce passant insolite la première fois que je l'ai remarqué dévalant la pente. Et puis mon étonnement a fait place à une certaine apréhension : et si cet homme vêtu d'un costume maintenant reconnu universellement se dirigeait vers la cible qui lui serait assignée pour un attentat suicide ?

Ce jour-là, pourtant, je n'ai entendu aucune explosion dans la ville... Le temps que ma surprise se dissipe, je me suis souvenue que les agents de la voierie urbaine portent ces combinaisons qui les protègent des salissures de leur métier aussi bien qu'elles les signalent à l'attention des conducteurs.

Et ce matin, quand l'homme est apparu de nouveau se dirigeant vers son poste dans la brume du soleil levant, j'ai eu le temps de saisir mon appareil photo avant qu'il ait disparu dans la ville.

2013 nov. 25

Atterrissage de nuit

Atterrissage de nuit à Kaboul


C'est finalement avec 30 heures de retard que nous sommes arrivés à Kaboul hier soir :)

2013 nov. 23

En carafe à Kunduz

C'est comme une punition ou une énorme bulle de pétole ;) Pour rentrer sur Kaboul depuis Rostaq, il faut faire à l'envers les quatre heures de trajet en voiture jusqu'à Kunduz avant de savoir si le vol y existe bien, même si la place est réservée. C'est que l'avion ne part de Kaboul pour sa boucle qu'à peu près au moment où les passagers se présentent à Kunduz... et les aléas climatiques ou commerciaux ne se manifestent qu'alors. C'est le cas aujourd'hui : le ciel est bouché avec un plafond haut se dispersant, et les fonctionnaires ont dûment enregistré nos bagages. Pendant ce temps, à Kaboul, les petits avions de l'UNHAS ne peuvent pas décoller en raison de la météo, et on nous annonce bientôt que le vol est reporté de plusieurs heures - et même peut-être annulé, on ne le saura pas tout de suite.

Transport urbain à Kunduz
Alors qu'on nous rend nos bagages, il faut imaginer un plan B : occuper le temps d'attente avant de savoir si le vol est maintenu ou pas ; prévoir une position de repli en cas d'annulation. Ca serait simple si les consignes de sécurité n'y avaient leur part : il est hors de question de laisser une expatriée flâner dans les rues de Kunduz, même accompagnée. Je reste dans le 'terminal' - un bâtiment remis à neuf mais déjà décrépi - à attendre que mes compagnons reviennent du bazar avec de quoi assurer le casse-croûte. Et heureusement, j'ai réussi à faire lever l'injonction à revenir au bureau de Rostaq en cas d'annulation, en négociant la possibilité de passer la nuit dans la guest house d'une ONG de Kunduz. Ouf...

Quand l'annulation de notre vol est confirmée, la quête d'une nuitée d'ONG en ONG nous fait pourtant atterrir de nouveau à Taloqan...! Sur une carte, notre route ressemblerait bien aux aberrations d'un voilier encalminé ;) Heureusement, il y a une ligne connectée à internet là où j'ai échoué, j'en profite pour vous montrer mes dernières perles...
Transport urbain à Rostaq

2013 nov. 21

Barbes blanches et chevaux

Oui, quand on les sollicite, les anciens participent-ils avec bonne volonté à des discussions qui engagent leur avenir. Oui, partagent-ils sans réticence la même pièce qu'une étrangère qui les passe à la question ;) Oui, témoignent-ils d'un souci sincère pour le bien-être de leurs communautés, enfants et femmes en premier lieu. Oui enfin, sont-ils étonnés de l'attention insistante qui serait portée à leurs coutumes, au détriment d'une aide plus globale au développement économique de leurs villages. Leur dignité est le rempart de leur survie.

Et l'amour avec lequel les tchapendar entretiennent les chevaux de bozkachi est un des signes de cette fierté.
Chevaux de bozkachi en promenade

2013 nov. 20

Vie en Takhar

Sur la route de Taloqan
Les nuages qui zébraient hier le ciel en altitude ne trompaient pas, j'aurais pu le prédire : il a commencé à pleuvoir dans la nuit, et nous avons dû changer nos projets pour la journée. Plus de visite d'un petit barrage hydroélectrique à deux heures de route - trop de risques de boue sur les chemins de montagne - mais une réunion dans un village à 11 kilomètres de l'autre côté du lit de la rivière - cinquante minutes de trajet, quand même ! Et alors que le petit groupe d'anciens que nous interrogions manifestait l'intention de nous garder pour déjeuner, la pluie s'est transformée en un épais rideau de neige. Il devenait urgent de rentrer, et même de commencer à s'inquiéter de notre retour samedi vers Kaboul : la route vers l'aéroport de Kunduz sera-t-elle praticable ? L'avion viendra-t-il jusque là ?

Tentes de l'école de filles de Rostaq
Du coup, se rappellent à moi les trois mille fillettes serrées à l'école de Rostaq que nous avons visitée il y a deux jours. La - très jeune - directrice nous faisait remarquer que, bien plus que la sensibilisation aux droits des enfants, ses soucis quotidiens concernaient l'amélioration de l'accueil de ses élèves, actuellement assises dans des tentes ou des abris crevés ouverts à tous vents. Il est probable que leurs sourires curieux et rieurs sous le soleil sont aujourd'hui aussi gelés que ceux des enfants trempés au bord de la route.
Classe de filles à Rostaq

2013 nov. 18

Marché à Rostaq

Bey et son fils au marché de Rostaq
Quand, d'aventure, le premier rendez-vous du matin se fait attendre et qu'on est jour de marché, alors prend-on le pouls bi-hebdomadaire des environs. On y rencontre le bey et son fils à cheval, le paysan sur son âne, et toute une multitude qui se presse autour des étals posés sur un linge à même le sol le long de l'avenue centrale ombragée par les arbres déjà effeuillés.
Paysan et son âne au marché de Rostaq

Bien sûr, la présence d'une étrangère armée de son appareil photo ne manquera pas d'étonner. Mais pour peu que l'on soit habillée couleur locale et que l'on marche modestement deux pas derrière les hommes qui nous font l'honneur de leur protection, les visages s'éclairent et manifestent une curiosité avenante.
Bienvenue au marché de Rostaq
Qui va là ?
Aucun intérêt... continuons notre chemin !

Chacun aura alors à coeur de présenter au mieux sa marchandise, comme le petit vendeur de fruits secs...
Etal de fruits secs au marché de Rostaq
ou l'étameur...
Etal d'étameur au marché de Rostaq
ou encore celui qui astique vigoureusement ses pommes à l'approche du chaland ;)
Le fruitier frotte ses pommes sur le marché de Rostaq

2013 nov. 17

En route vers Rostaq

Echoppes en bord de route avant Taloqan
C'est mon premier déplacement en dehors de Kaboul depuis l'escapade en Kapisa il y a plus d'un an. C'est aussi la première fois que je prends un vol des Nations Unies. Il s'agissait hier matin de se rendre dans une petite ville du nord du pays, dans la province de Takhar. Cela fait belle lurette que les internationaux ne traversent plus le pays par la grand-route trop souvent coupée par les insurgés.

Sur la route entre Kunduz et Taloqan
Levés tôt hier pour un décollage de Kaboul à neuf heures, nous devions atterrir à dix heures trente à Kunduz, chef lieu de la province voisine, et nous y faire récupérer pour encore deux heures de route de campagne.

Vol du WFP à Mazar
Surprise, l'avion se posa à Mazar-e Charif, soit trois cents kilomètres plus à l'ouest... Le plan de vol avait été modifié pour prendre de nouveaux passagers, et nous arrivâmes à destination à midi bien sonnées...

Derrière le rideau
Du coup, nous avons déjeuné dans une tchae-khana à Taloqan, sur la route. J'ai pu y admirer de très près les dessins du rideau derrière lequel j'ai dû rester confinée : n'est-ce pas irrésistiblement couleur locale ;)

Porteuse d'eau Heureusement, il y a eu les scènes cueillies à la volée au bord de la route. La fillette menant son âne chargé de bidons d'eau, le notable enturbanné transportant sa femme en burqa sur le siège de sa motocyclette, les boutiques du bazar rural... Les magnifiques paysages aux couleurs d'automne témoignent de la richesse de ces terres irriguées par le plus majestueux des fleuves, l'Amou Daria, et mises en valeur selon les exigences de la productivité moderne.

Entre Kunduz et Taloqan

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