2011 juin 11

Veillez donc...

...car vous ne savez ni le jour, ni l'heure. Matthieu 25-13

Les bourgeons orageux assombrissaient l'horizon hier soir à Nijrab. Un adjudant démineur faisait ses adieux à l'équipe du génie technique qu'il quittait pour regagner la France. Munie de mon baluchon de transhumance, je l'avais rejoint sur la DZ. En raison des chaleurs estivales qui limitent la portance des aéronefs, nous constituions à nous deux la charge maximum de l'appareil qui allait nous emmener vers Kaboul. A l'heure dite, le vol - un Cougar et une Gazelle - est arrivé de Tagab. Une fois le plein complété, nous nous sommes envolés.

C'est après avoir franchi la première crête en direction de la plaine de Chamali que le vent a commencé à sérieusement secouer. Il fallut toute la maîtrise du pilote du Cougar pour nous faire franchir la deuxième crête, au milieu d'une bourrasque de poussière qui allait en s'épaississant. Et c'est là, alors que nous arrivions dans le plat, que la visibilité est devenue nulle. L'appareil s'est posé au milieu de nulle part, à mon grand soulagement.

L'un des membres de l'équipage - le commando ai-je appris plus tard - a pris les opérations en main. On m'a demandé si j'avais une arme. Je suis restée à l'abri de la carlingue avec l'autre passager, sans arme lui aussi, alors que les six membres de l'équipage sortaient pour sécuriser la zone. Mais ce n'est pas la crainte d'une attaque qui les inquiétait le plus, c'est qu'ils avaient perdu le contact avec la Gazelle d'accompagnement.

La radio nous rassurait sur notre propre sort. Au bout d'une heure, la météo s'était suffisamment améliorée pour pouvoir redécoller et se diriger vers la base de Bagram, toute proche. Et c'est là que nous avons appris que la Gazelle, un appareil beaucoup plus léger que notre Cougar, s'était écrasée avant la deuxième crête, tuant l'un de ses pilotes et blessant gravement l'autre, éjecté dans le choc. En arrivant à l'ambassade ce matin, j'ai su que Matthieu Gaudin, le pilote décédé, arrivé sur le théâtre il y a deux semaines, était le neveu d'un membre du personnel consulaire.

Mes pensées vont vers lui et sa famille, ainsi que vers ses collègues du BatHélico. Merci à vous, Castor, Minou, Féfé, Denzel, Phil et Pierre C., qui êtes restés professionnels, maîtres de vous-mêmes, et en même temps attentifs à nous autres pax alors que le drame se déroulait.

Commentaires

1

quand la tragédie survient......
Prend bien soin de toi.
Bisous

Gauhar: Merci Did, bises

Le vendredi 24 juin 2011, 07:55 par didier

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