2016 mai 20
Case départ
14:42 - Par Gauhar - Saison 13 - Lien permanent
Donc, ce matin au petit jour je termine mes préparatifs pour le voyage :
trois bagages dont j'imagine qu'ils me vaudront un excédent, et je laisse
derrière moi les meubles, tapis, coussins et appareils ménagers que je confie à
un ami pour les remettre à une famille nécessiteuse de sa connaissance.
Certaines pièces d'ameublement ont déjà fait l'objet de cadeaux à d'autres
amis : coiffeuse et son miroir à une jeune mariée, meuble bibliothèque à
un intello méritant, bureau et micro-onde à l'aîné courageux d'une grande
famille...
J'ai calculé large pour mon arrivée à l'aéroport, et je voyage souvent le
vendredi afin d'éviter les embouteillages urbains. J'ai donc le temps de faire
la photo des panneaux solaires qui permettent l'autonomie énergétique du
complexe aéroportuaire. Ils occupent la place qui avait été initialement
affectée à un grand parking, lequel a été relégué beaucoup plus loin par les
mesures de sécurité. Arrivée à l'enregistrement, je règle sans sourciller la
surtaxe de poids, puis me dirige vers la zone d'embarquement où j'espère
pouvoir piquer un roupillon en attendant l'heure.
Au contrôle de l'immigration, je signale ma bonne foi en pointant que mon visa
est expiré depuis cinq jours. Pour ceux qui suivent, j'avais eu bien du mal à
l'obtenir, et l'ambassade afghane à Paris ne m'avait finalement délivré
qu'un mois sur les deux que j'avais payés, arguant que le double coût était dû
au titre de la ...procédure d'urgence ! Mais il suffirait, selon
l'expérience de voyageurs précédents, de s'acquitter d'une taxe-amende
correspondant aux jours en dépassement, cinq dans mon cas.
Et là, la machine s'enraye. L'officier d'immigration me dit que je ne peux pas
embarquer. Malgré mes protestations, ma réservation est annulée et reprogrammée
deux jours plus tard - une cinquantaine de dollars quand même - et je me
retrouve dans un taxi - mon accompagnateur est parti depuis longtemps - avec
consigne de me présenter au ministère du Tourisme pour la prolongation si je
veux avoir l'insigne privilège d'embarquer la prochaine fois. Les amis auxquels
je téléphone sont atterrés, et concluent que le vendredi il ne doit pas y avoir
de fonctionnaire ad hoc à l'aéroport...
Pour compléter l'amertume de cette journée, une fois rentrée dans mon
appartement où j'espère passer les quarante-huit heures de délai puisque j'en
suis légitimement la locataire encore jusqu'au 20 juin, je découvre que ces
quelques heures ont suffi pour que les plus belles pièces d'ameublement en
aient été subtilisées par l'un des bénéficiaires de mes dons, non satisfait de
la répartition que j'avais programmée...
L'Afghanistan cherche-t-il à se faire haïr ? Ou est-ce seulement une
manifestation du désespoir ambiant, qu'une délicate opération de médiation
pourrait dépasser en redonnant à chacun l'assurance d'être estimé et l'occasion
de manifester son honneur ?